Exégèse & herméneutique : de grave lacunes
"19:3 Et les pharisiens vinrent à lui, l'éprouvant et lui disant: Est-il permis à un homme de répudier sa femme pour quelque cause que ce soit ?
19:4 Et lui, répondant, leur dit: N'avez-vous pas lu que celui qui les a faits, dès le commencement les a faits mâle et femelle, 19:5 et qu'il dit: "C'est pourquoi, l'homme laissera son père et sa mère et sera uni à sa femme; et les deux seront une seule chair? 19:6 Ainsi, ils ne sont plus deux, mais une seule chair. Ce donc que Dieu a uni, que l'homme ne le sépare pas.
19:7 Ils lui disent: Pourquoi donc Moïse a-t-il commandé de donner une lettre de divorce, et de la répudier?
19:8 Il leur dit: Moïse, à cause de votre dureté de cœur, vous a permis de répudier vos femmes; mais au commencement il n'en était pas ainsi. 19:9 Et je vous dis que quiconque répudiera sa femme, non pour cause de fornication, et en épousera une autre, commet adultère; et celui qui épouse une femme répudiée, commet adultère.
19:10 Ses disciples lui disent: Si telle est la condition de l'homme à l'égard de la femme, il ne convient pas de se marier.
19:11 Mais il leur dit: Tous ne reçoivent pas cette parole, mais ceux à qui il est donné; 19:12 car il y a de eunuques qui sont nés tels dès le ventre de leur mère; et il y a des eunuques qui ont été faits eunuques par les hommes; et il y a des eunuques qui se sont faits eux-mêmes eunuques pour le royaume des cieux. Que celui qui peut le recevoir, le reçoive." Version DARBY
Que ce soit d'un point de vue de l'exégèse ou de l'herméneutique, l'interprétation libérale de Matthieu 19.9 qui crée une clause d'exception n'a aucun fondement biblique !
Les partisans de la doctrine du divorce et du remariage pour infidélité font reposer les fondements de leurs enseignements sur cet unique verset de Matthieu 19.9 (Matthieu 5.32 étant une clause d'exemption et donc n'apporte aucun soutien à leur doctrine) et pensent ainsi sincèrement justifier leur libéralisme à la lumière de la bible.
- 1ère erreur :
Les libéraux interprètent donc tous les passages clairs de la bible à la lumière d'un passage obscur. Car notons le bien, Matthieu 19v.9 est un passage difficile à cerner dans son ensemble.
Et pourtant les règles de l'herméneutique déclarent le contraire ! Les fondements de notre foi et de nos doctrines théologiques doivent reposer sur des fondations solides et sans équivoques.
- 2ème erreur :
Les lecteurs et auditeurs de l'évangile de Marc, par exemple, ne souffriraient-ils pas de ce vide théologique en sachant que l'évangile de Matthieu a vraisemblablement été rédigé plus tard ?
Et les destinataires de l'évangile de Luc (à destination des grecs), ont-il dû attendre de recevoir l'enseignement de Jésus selon l'évangile de Matthieu avant de pouvoir enfin divorcer de leur époux(se) infidèle ?
Et encore pour ceux qui n'auront jamais eu à disposition que l'enseignement d'un seul évangile, qu'en est-il ?
Dirons-nous que l'enseignement qu'ils ont reçu était incomplet.
N'oublions pas que d'avoir en main tous les évangiles, lettres et épitres en un seul volume est un privilège qui n'existait pas durant les premiers siècles de l'église.
Les premiers chrétiens devaient pouvoir recevoir l'entièreté de la bonne nouvelle et des enseignements de Jésus à la lumière d'un seul évangile.
Si cette clause d'exception a réellement été enseignée par Jésus dans l'évangile de Matthieu, les autres auteurs n'auraient-ils pas alors oublié un enseignement primordial dans leur propre évangile?
- 3ème erreur
Lorsque les pharisiens l'interrogent sur la question de la répudiation, la lapidation pour adultère était toujours une réalité (Jean 8 et la femme adultère). Et donc, comme en Deutéronome 24, ce n'était pas le débat d'un divorce pour infidélité conjugale post-mariage qui était soulevé.
La question débattue était de savoir si l'on pouvait répudier sa femme pour n'importe qu'elle raison (l'adultère était exclu puisque le coupable était lapidé).
Lorsque Jésus évoque l'infidélité, comprenons bien qu'il ne s'agit pas de l'adultère comme beaucoup voudrait bien l'interpréter mais de la fornication.
Le terme "infidélité" n'est pas le mot original (voir "Erasmus et son cheval de Troie" pour plus de détails). Le terme exact est "Fornication".
Malgré que deux fiancés soient légalement liés l'un à l'autre, le mariage n'était complet qu'une fois l'acte sexuel consommé lorsque après une certaine période la fille était amené vers son futur mari qui la prenait définitivement pour épouse.
Jusqu'alors, s'il y avait infidélité, il ne s'agissait pas d'adultère (infidélité d'une personne mariée) mais de fornication.
L'exemple de Joseph et de Mari confirme cette culture hébraïque dépeint dans ce même évangile de Matthieu.
Ce dernier, suite à la grossesse de Marie durant leurs fiançailles, croyant avoir été trompé envisage de la répudier en secret (Matthieu 1.19).
Si l'infidélité survenait avant le mariage définitif, malgré que la loi punisse de mort un tel acte, l'usage était vraisemblablement plus clément. En outre, l'adultère au cours d'un mariage établi était condamnable au plus au point.
Toux ceux donc qui utilisent ce passage pour justifier leur remariage suite à une infidélité conjugale omettent donc un détail :
- Leur situation ne rentre pas dans le contexte de ce passage biblique et donc ne peut-être leur être appliqué à moins qu'ils se soient divorcés de leur fiançailles.
Si Matthieu 19.9 semble effectivement ouvrir une porte au divorce suite à une infidélité conjugale notons bien qu'il s'agit de la répudiation d'une fiancée.
Que quelqu'un rompe les fiançailles suite à l'infidélité de son ou sa fiancé(e) est tout a fait compréhensible puisque leur union n'a pas été scellée devant Dieu étant donné qu'il n'y a pas eu l'union d'une seule chair (l'acte sexuel).